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COVID-19: approche systémique (5)

Dernière mise à jour : 24 févr. 2021

Résultats des travaux de cours relatifs à l’approche systémique appliquée à la crise COVID-19, dans le cadre du

Séminaire de recherche « Gestion de projets socio-techniques complexes »;

Master en Politique et Management Publics, 23-25 novembre 2020, UNIL/IDHEAP

Arbër Beqa, Lucas Romy, Dr Philippe Vallat


Nous publions ici une série d'articles tirés d'une publication en cours de rédaction.


1 Cadre général

2 Introduction théorique

3 Thème 1 : Crise sanitaire

4 Thème 2 : Vaccination

5 Thème 3 : Société post-covid

6 Thème 4 : Confiance dans les autorités

7 Thème 5 : Indicateurs

8 Synthèse et conclusions

9 Méta-discussion

10 Littérature complémentaire


5 Thème 3 : Société post-covid

5.1 Faits

Nous sommes partis de l’idée que chaque grand bouleversement sociétal implique des changements irréversibles, modifiant durablement la société. Nous avons pensé aux situations de la première et de la seconde guerre mondiale, dans lesquelles il existe un avant et un après. Un exemple concret de ce changement est la fiscalité. Nous pouvons voir qu’avant ces deux guerres mondiales, l'État s’occupait principalement des fonctions régaliennes et monétaires telles que la monnaie (banque centrale), la défense (intégrité territoriale), les relations extérieures et diplomatiques interétatiques. À la suite de ces deux bouleversements sociétaux, l'État a pris une place plus grande dans la société au travers l'État providence et la mise en place de filets de sécurité à l’image de l’assurance vieillesse, le chômage. Et pour financer cela, les états européens tels que la France, l’Allemagne et la Suisse ont dû créer de nouveaux impôts à des taux plus élevés qu’avant la guerre[1].


En nous basant sur ces changements intervenus plus tôt, nous pouvons déjà voir des changements : la façon de travailler avec le télétravail[2], la baisse de la pollution, sonore et chimique[3]. Nous nous sommes ainsi demandé à quoi ressemblerait la société de demain, la « société post-covid ». Ainsi, nous avons proposé 6 postulats:


  1. La difficulté de prédiction pour la société post-covid 19 (validité moyenne/stabilité faible)

  2. Le retour à la “normale” est impossible car chaque crise à un impact, peu importe l’importance de cette dernière (validité forte/stabilité forte)

  3. La situation de crise ne permet actuellement pas de prévisions à long terme (validité forte/stabilité forte)

  4. Cette crise a changé la perception du temps et de l’espace (validité forte/stabilité forte)

  5. La crise va potentiellement engendrer des conflits entre pays et personnes pour avoir le médicament ou la cure pour se soigner (validité moyenne/stabilité moyenne)

  6. Il n'existe pas de solution unique pour venir à bout de la crise du Covid-19 (validité forte/stabilité forte).


Nous nous sommes imaginé que cette crise pouvait engendrer une remise en question de notre mode d'organisation et de stabilité sociétale : nous pourrions grossièrement décrire un avant et un après comme suit :


Avant

Médecine de pointe, prévention, longévité, éradiquer les danger, expansion sociale (proximité), humain tout puissant.

Après

Nouvelle façon de vivre avec, attitude court-termiste, perte de repères, distance sociale, humain mortel.


5.2 Description du problème

En l’état actuel, nous avons identifié les inconnues suivantes :


Economie :

  • Le Télétravail jusqu'à quel point ?

  • Mondialisation ?

  • Quid de l'industrie du tourisme ?


Social :

  • Digitalisation ?


Mobilité et environnement :

  • Quel sera la mobilité de demain ?

  • La pollution des masques ?

  • Retour à une économie de marché très polluante ?


Santé :

  • Effets à long terme du Covid ? (Neuronal, pulmonaires, etc.)

  • Dépression, stress, quels effets du confinement sur la santé mentale ?

  • Mutation du virus ?

  • Risque d'une autre épidémie ?


En tant que citoyens, nous ne savons pas encore ce que sera notre vie après cette pandémie, pour le moment nous ne pouvons qu’avoir des suppositions, p.ex. s’il y aura une autre pandémie, si les budgets et coûts de la santé vont augmenter ou diminuer, si des innovations vous nous permettre de maintenir voire améliorer notre santé.


A partir de ces réflexions et des postulats, nous avons identifié huit variables :


  1. Surcharge du système de santé (variable centrale)

  2. Le rapport sain à la mort

  3. L'augmentation des épidémies

  4. L’environnement malsain

  5. L’innovation technologique médicale

  6. L’augmentation des coûts de la santé

  7. Le manque de personnel soignant

  8. La baisse du budget de la santé


5.3 Modèle qualitatif


Figure 17: Société post-covid: modèle simple


Dans le cadre choisi, toutes les variables ont une influence positive sur la surcharge du système de santé, sauf le rapport à la mort. Cela semble être à ce stade la seule variable qui pourrait jouer un rôle régulateur dans le système.


La matrice d’interactions de Vester a donné le résultat suivant :

Figure 18: Société post-covid: matrice d'interactions de Vester


L'augmentation des épidémies (var3), fortement connectée, apparaît comme un catalyseur (caractéristique dominante du système) de la surcharge du système de santé.


L’environnement malsain (var4) est une variable faiblement connectée et très active : c’est une bombe à retardement dans le système, relativement prédictible. C’est un levier d’action à long terme.


Le rapport sain à la mort (var2), variable passive et faiblement connectée, apparaît comme un indicateur neutre, stable.


L’innovation technologique médicale (var5) est passif et connecté. Sa polarité négative (triangle rouge) se trouvant horizontalement au même niveau, l’interprétation à en faire est que les avantages qu’elle apporte (dimension active) sont contrebalancés par d’autres variables dans le système (dimension passive). Elle n’apparaît donc pas comme un levier déterminant pour réduire la surcharge du système de santé.


L’augmentation des coûts de la santé (var6) est passive et connectée, donc un indicateur à moyen terme. C’est une variable avec une certaine dépendance aux autres et avec peu d’impact sur le système : elle est une conséquence du système (symptôme) plutôt qu’un levier de changement.


Le manque de personnel soignant (var7) est une variable active et fortement connectée. Elle constitue donc une solution à moyen terme : elle peut avoir un impact spécifique important avec des effets secondaires limités.


5.4 Conclusion intermédiaire

En interprétant ce modèle, nous constatons que la variable qui a une importance plus marquée dans le monde post-covid en rapport avec la surcharge du système de santé, est la récurrence des épidémies. Ce paramètre n’est guère influençable par l’activité humaine, du moins sur le court-terme. En contrepartie, un levier intéressant pour réduire cette surcharge serait d’agir contre le manque de personnel soignant.

Une variable intéressante, parce qu’elle se trouve à un autre niveau que technocratique, est la relation qu’entretient notre société à la mort, et à la maladie. Cela a conduit à une réflexion de nature éthique et à se poser des questions fondamentales sur le mode de fonctionnement de notre société.

Un constat intéressant est également d’observer un narratif dans les discours politiques et médiatiques sur un « retour à une normalité ». Or il nous semble plus probable que cette crise engendrera des modifications irréversibles, qu’il serait bon de pouvoir débattre.

[1] Piketty T. (2013), le capital au XXIème siècle, Edition du seuil. PP: 130-145. [2] Tabrizi K. (2020), La pertinence des notions de téléfragile-télérobuste pour mieux manager demain, https://tenzingconseil.fr/2020/07/20/la-pertinence-des-notions-de-telefragile-telerobuste-pour-mieux-manager-demain/, consulté le 5.1.2020 [3] Collins C. (2020), Covid is cutting air pollution but it will not slow climate change, https://sciencebusiness.net/covid-19/news/covid-19-cutting-air-pollution-it-will-not-slow-climate-change, consulté le 5.1.2020

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