top of page
  • Philippe Vallat

Changement de paradigme

Dernière mise à jour : 31 janv. 2022

Saviez-vous qu’en Suisse, il est interdit de circuler sur la voie publique avec un véhicule motorisé ?


Le paradigme

C’est même la règle, et non pas l’exception. En effet, l’Etat, qui vous pose cette interdiction, peut toutefois vous permettre de circuler, à certaines conditions : vous devez avoir plus de 18 ans, réussir des examens, théoriques et de conduite, et payer des émoluments pour cela. Ce « permis de conduire », comme son nom l’indique, une permission, peut d’ailleurs vous être retiré, temporairement ou définitivement, en fonction d’infractions que vous commettriez, de règles que vous ne respecteriez pas. Conduire un véhicule motorisé sur la voie publique n’est donc pas basé sur un « droit », mais sur une « interdiction ».

Le respect de ces conditions est contrôlé par des services et agents publics : offices de la circulation, police, justice. Les décisions, administratives ou judiciaires, qu’ils prennent, peuvent faire l’objet de recours.


Le changement de paradigme

Imaginez que l’Etat – ou même le peuple par voie démocratique - décide de changer de paradigme. Dans un délai très court, inversion totale de la logique : dorénavant, tout un chacun pourrait circuler librement avec un véhicule à moteur, sans restriction d’âge, sans nécessité d’apprendre ni le code de la route, ni les premiers secours, ni la conduite. L’Etat pourrait même déléguer à des citoyens la tâche d’empêcher d’autres citoyens de circuler, décisions qui ne pourraient pas faire l’objet d’un recours. Inimaginable, n’est-ce pas ?


Changement systémique

Qu’est-ce qu’un paradigme ? En épistémologie et dans les sciences humaines et sociales, une représentation du monde, une manière de voir les choses, un modèle cohérent du monde qui repose sur un fondement défini (matrice disciplinaire, modèle théorique, courant de pensée). (Wikipedia)

Un changement de paradigme est donc une révolution conceptuelle, une définition d’un autre modèle cohérent du monde et de la société, un changement significatif dans la théorie ou la pratique.

Donella Meadows a identifié les 12 leviers de changement dans un système complexe, que j’ai présenté précédemment. Le levier le plus puissant de changement dans un système est bien le changement de paradigme, qui constitue une transformation totale du système, soit ses objectifs, ses flux, ses rétroactions, ses règles.


Comment induire un changement de paradigme

Prenons l’exemple fictif suivant. Dans les sociétés modernes démocratiques, les citoyens ont la liberté, le droit, souvent inscrit constitutionnellement, de mener une vie sociale et de se déplacer comme ils le désirent, sans contraintes autres que celles que prévoient la bienséance et le bon sens. La vie sociale est par défaut autorisée, voire même activement encouragée par l’Etat, à l’exemple du soutien à la culture.


Cette liberté peut, pour une minorité d’individus, faire l’objet de certaines restrictions, voire même de privations. L’Etat peut prendre des décisions juridiques ou administratives qui peuvent restreindre vos libertés : p.ex. des mises à ban, des peines de prisons etc. Pour appliquer ces restrictions, l’Etat intervient par le biais de décisions administratives ou judiciaires, mises en œuvre par des agents de la fonction publique, uniformés ou non, lesquelles décisions peuvent faire l’objet de recours. Ce principe a même été renforcé constitutionnellement avec l'art. 29a Cst.3 qui prévoit depuis le 1er janvier 2007 que «toute personne a droit à ce que sa cause soit jugée par une autorité judiciaire». Ainsi toute personne, physique ou morale, disposant d'un simple intérêt digne de protection et dont les droits et obligations pourraient être touchés par une action étatique peut solliciter de l'État une décision, y compris et surtout sur des actes matériels des entités publiques, et cas échéant ensuite de la contester devant un juge indépendant (voir notamment Le droit à l'accès au juge (art. 29a cst.): une voie redoutable souvent oubliée, Romain Jordan, Stéphane Grodecki, Anwalts Revue de L'Avocat 10/2018).


Imaginons: un changement de paradigme social

A quoi ressemblerait un changement de paradigme de la vie sociale ? Ce serait une société où toute interaction sociale, toute vie sociale serait par défaut interdite. Elle ne serait possible qu’à un nombre restreint de personnes, et à certaines conditions.


Par exemple, pour se rendre dans des lieux communs de la vie sociale, tels l’Université, l’hôpital, les lieux de loisirs et de gastronomie etc., il serait nécessaire d’obtenir une autorisation d’accès. Cette autorisation serait soumise à conditions (comme un permis de conduire) : nécessité de faire des examens, de payer des émoluments etc. Une telle autorisation, sous forme digitale ou papier, devrait être montrée, avec une pièce d’identité, non pas à un agent étatique, mais à un autre citoyen qui aurait reçu délégation de l’Etat pour ce faire. Il s’agit donc d’une forme de contrôle social. Sans ces documents, l’accès serait interdit.

Pour corser le tout, les conditions d’autorisation changeraient avec le temps, de manière arbitraire et imprévisible, réduisant constamment le nombre de personnes ayant temporairement certains accès.


Les contacts sociaux, pourraient faire l’objet de règles strictes de comportement, en matière d’habillement ou de salutations par exemple, qui pourraient même être différenciés par groupes spécifiques. Le nombre de personnes pouvant se réunir en privé pourrait également faire l’objet de restrictions. Ces restrictions de comportement social pourraient faire l’objet non plus de contrôles étatiques, mais de contrôle social, qui présente l’immense avantage qu’il n’y aurait pas besoin d’engager de nombreux fonctionnaires pour le faire, la dénonciation et la délation devenant des piliers incontournables du nouveau paradigme. Il n’y aurait pour l’Etat plus besoin d’émettre des décisions formelles qui pourraient faire l’objet de recours.


Transcender les paradigmes

Evidemment, personne ne souhaiterait vivre dans une telle société, qui généreraient d’importants dégâts économiques, sociaux, et aussi de santé psychique. Car l’humain a moins besoin d’un véhicule, que de liens sociaux.


Mais si cela devait tout de même arriver une fois, que pourrions-nous faire pour rester mentalement, philosophiquement, spirituellement, en bonne santé ? Pour rester profondément Humain ?


Donella Meadows parle du douzième et plus puissant levier du changement systémique: le pouvoir de transcender les paradigmes. Cela consiste à ne s’attacher à aucun paradigme, à maintenir un esprit d’ignorance, à développer la pensée du “point zéro”, à être libre de toute illusion, reconnaissant que tout paradigme est une construction mentale, individuelle ou sociale, qui n’a pas de réalité en soi.

  • Concrètement, cela signifie travailler sur soi : entrer en contact avec ses émotions, ses pensées, ses croyances, ses attachements, ses peurs.

  • Cela signifie être en contact avec le réel, au quotidien : faire l’expérience du vivant, de la matière, de la météo, des autres êtres sensibles.

  • Cela signifie aussi revenir à l’instant présent, là, tout de suite, ici et maintenant : concrètement, juste là, quel est mon problème ?

  • Cela signifie travailler son équanimité, à l’exemple du conte zen du paysan et du cheval blanc.

  • Cela signifie aussi discuter ensemble de la société, de la culture partagée que nous souhaitons co-construire: quelle place donner à la technologie, au progrès médical, quel sens donner à notre vie, quel lien entretenir avec Plus Grand que soi?

  • Cela signifie se mettre dans une logique de médiation, plutôt que de polarisation, selon le principe de permaculture « intégrer plutôt que séparer ».

  • Cela signifie débattre ensemble des questions de valeurs partagées et de sens.

Relèverez-vous le défi avec nous en 2022 ?



Vous avez un trop plein d’émotions, des peurs, des doutes, des remords. Vous avez des décisions difficiles à prendre, des hésitations. Vous avez des questions existentielles, philosophiques, spirituelles. Vous avez besoin d’une oreille bienveillante et non-jugeante où déposer l’indicible. Vous avez besoin de médiation, de facilitation en intelligence collective.

COMITANS vous accompagne, individuellement ou collectivement, dans votre chemin et vos transformations. Prenez contact sans engagement et en toute discrétion.

243 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout
bottom of page